Mars - Mai 2023

Décret n° 2023-417 du 31 mai 2023 sur la résiliation « en trois clics » des contrats conclus par voie électronique

Conformément à l'article 15 II de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat (commentée ICI), l'exécutif a publié le décret n° 2023-417 du 31 mai 2023 relatif aux modalités techniques de résiliation des contrats par voie électronique (JORF n°0125 1er juin 2023 Texte n°1). Ladite loi prévoyait que dès lors qu’un professionnel offre aux consommateurs la possibilité de souscrire un contrat par voie électronique y compris via une application, il doit également mettre à sa disposition une fonctionnalité gratuite lui permettant d'accomplir en ligne les démarches de résiliation du contrat, dite « résiliation en trois clics », ici explicitée.

Entrant en vigueur au 1er juin 2023, elle s'applique à tous les types de contrats (abonnements, services, location) en cours, y compris souscrits sur papier ou à venir. La DGCCRF laisse néanmoins aux entreprises jusqu'au 1er septembre 2023 pour s'y conformer.

Cette nouvelle faculté ne modifie pas les conditions de résiliation des contrats. Ainsi, si le contrat prévoyait un délai de préavis, celui-ci reste valable et la résiliation n’interviendra qu’à son échéance. De même, dans le cas où le contrat prévoirait une période d’engagement minimale, la résiliation n’est pas possible avant la fin de cette période, sauf si la loi ou le contrat permet, généralement sous certaines conditions (par exemple le paiement d’une indemnité de rupture), une résiliation anticipée.

Le décret offre pour autant une nouvelle modalité de résiliation au consommateur, lui évitant, par exemple, l’envoi d’un courrier recommandé ou d’autres démarches plus complexes visant à ralentir ou décourager les démarches de résiliation. Le dispositif vient subséquemment libérer le choix du consommateur de se porter vers des offres qu'il jugerait plus intéressantes en mettant fin plus facilement à son contrat en cours d'exécution.

Le décret assure au consommateur et au non-professionnel la possibilité de notifier au professionnel la résiliation d'un contrat en quelques validations, en lui garantissant un accès « rapide, facile, direct et permanent » à la fonctionnalité prévue par la loi via une mention du type « "résilier votre contrat" ou une formule analogue dénuée d’ambiguïté, affiché en caractères lisibles ». Le décret dispose en outre que le professionnel ne saurait contraindre le consommateur à créer un compte client pour accéder à la résiliation, sans préjudice de la possibilité de lui demander de l’utiliser si cet espace a été antérieurement créé.

Ainsi, depuis l'interface en ligne – notamment le site internet ou l'application mobile – permettant la conclusion de contrats avec un professionnel, le consommateur accède directement et facilement à la fonctionnalité de résiliation. Il s'agit là du premier clic. La fonctionnalité « peut » (sic.) comporter des informations sur les conditions de la résiliation des contrats (comme les cas dans lesquels la rupture du contrat entraîne l'obligation de payer une indemnité ou le respect d'un délai de préavis), ainsi que sur les conséquences de la résiliation.

Le consommateur est alors amené sur une seconde page à renseigner ou confirmer les informations mentionnées par le présent décret permettant de l'identifier et de désigner le contrat à résilier. Pour le cas très particulier où le consommateur résilie le contrat de façon anticipée, le décret prévoit des conditions spécifiques pour la mise en œuvre de la résiliation qui dépend de l'existence d'un motif légitime (cf. art. D. 215-1 II C.conso.) : le consommateur est informé des pièces justificatives à communiquer au professionnel et dispose d'une rubrique pour préciser le motif légitime de résiliation, ainsi que d'une adresse postale et d'une adresse électronique ou d'une fonctionnalité pour transmettre au professionnel le justificatif de ce motif légitime.

Enfin, à titre de troisième clic, le décret prévoit que le consommateur est finalement dirigé vers une dernière page récapitulative des informations fournies à partir de laquelle il notifie sa résiliation. L'entreprise confirme alors la réception de la décision de résiliation et informe dans un délai raisonnable le consommateur sur la date et les effets de la résiliation.

Cette nouvelle prérogative contractuelle rendant largement libre et acteur le consommateur de ses relations contractuelles avec des professionnels bénéficie particulièrement à celui qui entend se saisir de la faculté de résilier un contrat de communications électroniques sans être tenu de payer la fraction non échue de la période courant jusqu'à la fin de l'engagement contractuel ni les sommes dues au titre de la résiliation anticipée en application de l'article L. 224-37-1 du Code de la consommation lorsqu'il est en situation de surendettement, et en application de la jurisprudence en vigueur en cas, notamment, de licenciement pour un contrat de travail à durée indéterminée, de force majeure, ou de déménagement à l'étranger. De même, il permet aux consommateurs titulaires d'un contrat de fourniture de service de télévision au sens de l'article 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication et d'un contrat de fourniture de services de médias audiovisuels à la demande, de mettre gratuitement un terme au contrat, à tout moment à compter de la première reconduction, en application du dernier paragraphe de l'article L. 215-1 du Code de la consommation dès lors qu'ils changent de domicile ou que leur foyer fiscal évolue.

25 avril 2023 - Désignation par la Commission des plateformes soumises au règlement sur les services numériques (DSA)

Le 25 avril dernier, la Commission européenne a publié au titre du règlement sur les services numériques (Digital Services Act dit « DSA ») du 19 octobre 2022 la liste des plateformes soumises à ce dernier.

Sont ainsi désignés par l'exécutif européen :

  • Dix-sept « très grandes plateformes en ligne » (Very large online platforms, dites VLOP) : Alibaba, AliExpress, Amazon Store, Apple AppStore, Booking.com, Facebook, Google Play, Google Maps, Google Shopping, YouTube, Instagram, LinkedIn, Pinterest, Snapchat, TikTok, Twitter, Zalando et Wikipedia.
  • Deux « très grands moteurs de recherche » (Very large Online Search engine, dits VLOSE) : Bing et Google search.

Cette liste a été arrêtée au regard du fait que ces services comptaient au moins 45 millions d'utilisateurs actifs par mois, soit 10% de la population européenne, au 17 février 2023.

« Quatre ou cinq » autres services soupçonnés d’avoir sous-estimé leur nombre d’utilisateurs en Europe pourraient rejoindre la liste dans « les prochaines semaines » a précisé la Commission européenne dans son communiqué.

Les services ainsi désignés doivent se plier d'ici au 25 août 2023 à certaines obligations comme conférer la possibilité de se soustraire aux systèmes de recommandations fondés sur le profilage, signaler facilement des contenus illicites avec un traitement assez rapide (« avec diligence ») ou encore ne pas utiliser certaines données sensibles pour le ciblage des publicités.

Structurellement, d'ici quatre mois, ces entreprises devront également avoir adapté leurs systèmes, ressources et processus de mise en conformité, mis sur pied un système indépendant de contrôle de la conformité, effectué leur première évaluation annuelle des risques et l'avoir communiquée à la Commission.

Arrêté du 4 avril 2023 sur la tarification du service de livraison du livre

L'arrêté du 4 avril 2023 qui fixe un montant minimal de tarification du service de livraison du livre (pris en application de la loi n° 2021-1901 du 30 décembre 2021 visant à conforter l'économie du livre et à renforcer l'équité et la confiance entre ses acteurs, qui complète elle-même la loi n° 81-766 du 10 août 1981 relative au prix du livre) a été publié au JORF le 7 avril. Le texte destiné à protéger l'économie du livre dans la distribution de proximité via les librairies entrera en vigueur en octobre 2023.

Le montant minimal de tarification a été fixé à 3€ toutes taxes comprises pour toute commande comprenant un ou plusieurs livres dont la valeur d'achat en livres neufs est inférieure à 35 € toutes taxes comprises. Au-delà du prix de ce panier, la livraison peut être gratuite. Le tarif minimal ainsi fixé s'applique au service de livraison d'une commande quel que soit le nombre de colis composant cette commande.

Proposition de directive du 22 mars 2023 concernant les allégations environnementales, dite directive « Green Claims »

Le 22 mars 2023, à côté de la Proposition de directive relative à la réparation des biens, la Commission publia une seconde proposition de directive concernant les allégations environnementales, dite directive « Green Claims ». Selon la Commission, dans le marché commun, 53 % des allégations environnementales des entreprises contiendraient des informations « vagues, trompeuses ou infondées », et 40 % seraient « totalement dénuées de fondement ». L’absence de cadre européen commun à ce sujet favorise l’écoblanchiment et génère une concurrence inéquitable sur le marché commun. Cette proposition de directive comporte une nouvelle série de mesures pour obliger les entreprises à étayer leurs allégations écologiques par des preuves scientifiques crédibles et ainsi les empêcher de s’enorgueillir d'allégations trompeuses sur les avantages environnementaux de leurs produits et services.

Le dessein général de la proposition de directive consiste à ce que les consommateurs bénéficient de plus de clarté, d'une plus grande assurance qu'un produit vendu comme étant écologique l'est réellement et d'une information de meilleure qualité pour choisir des produits et des services respectueux de l'environnement.

Du côté des entreprises, le texte évite consécutivement une concurrence déloyale assise sur ces sujets et contribue à établir des conditions de concurrence équitables pour ce qui est de l'information sur la performance environnementale des produits.

La proposition de directive s’inscrit dans un ensemble plus vaste de propositions sur l’économie circulaire dont la proposition visant « à donner aux consommateurs les moyens d’agir en faveur de la transition écologique » (proposition responsabilisation des consommateurs). La Commission européenne livre les clés d’articulation entre les deux textes. La proposition responsabilisation des consommateurs est présentée comme une loi générale, cependant que la proposition relative aux allégations environnementales est présentée comme une loi spéciale ou comme un « filet de sécurité ». L’expression n’est pas nouvelle en droit européen, puisque la Commission européenne avait ainsi rétrospectivement qualifié la directive sur les pratiques commerciales déloyales dans son premier documentation d’orientation (CO(2013) 138 final). La proposition relative aux allégations environnementales est destinée à « servir de filet de sécurité pour tous les secteurs dans lesquels les allégations ou les labels environnementaux ne sont pas réglementés au niveau de l'UE. Elle ne vise pas à modifier les règles sectorielles existantes ou futures ».

Dans les mêmes buts, une méthode européenne de calcul de l’empreinte environnementale des produits (dite PEF pour «
product environmental footprint ») a été établie, mais la Commission européenne n’a pas souhaité imposer cette méthodologie qui ne conviendrait pas, selon elle, à tous les secteurs.

Le législateur européen définit l’ « allégation environnementale » comme « tout message ou représentation, qui n’est pas obligatoire en vertu du droit de l’Union ou du droit national, comprenant les représentations textuelles, picturales, graphiques ou symboliques, sous quelque forme que se soit, y compris étiquettes, noms de marque, noms de sociétés ou noms de produits, dans le cadre d’une communication commerciale, qui indiquent qu’un produit ou un commerçant a un impact positif ou nul sur l’environnement ou est moins dommageable pour l’environnement que d’autres produits commerçant, ou a amélioré son impact au fil du temps ».

Le législateur européen vise ainsi les allégations explicites mais entend également s'attaquer à la prolifération des labels et à la création de nouveaux labels environnementaux publics et privés. La proposition couvre subséquemment toutes les allégations volontaires concernant les incidences, les performances ou les aspects environnementaux d'un produit, d'un service ou du professionnel lui-même. Elle exclut toutefois les allégations qui sont couvertes par les règles existantes de l'UE, telles que le label écologique de l'UE ou le logo des denrées alimentaires biologiques, car la législation en vigueur garantit déjà la fiabilité de ces allégations réglementées. – Les allégations qui seront couvertes par de prochaines dispositions réglementaires de l'UE seront exclues pour la même raison.


Avant toute apposition sur les produits ou communication sur les services, les allégations environnementales devront préalablement avoir été vérifiées par un organisme tiers vérificateur accrédité afin de s’assurer qu’elles répondent en tout point aux exigences du droit européen, y compris de cette directive Green Claims. Exit donc les auto-labels, auto-marquages ou les labels avec des schémas d’attribution opaque.

En outre, au terme de la proposition de directive, les professionnels recourant à des allégations environnementales seront tenus de :

- Préciser la portée de l’allégation (tout ou partie du produit ou des activités)

- S’appuyer sur des preuves scientifiques largement reconnues et tenir compte des normes internationales pertinentes

- Prouver que l’allégation est bien en lien avec un impact environnemental majeur du produit du point de vue du cycle de vie

- Démontrer que l’allégation prend en compte tous les aspects significatifs du cycle de vie en cas d’allégation sur la performance environnementale

- Admettre que l’allégation ne doit se faire que si le produit/service a des caractéristiques supérieures à la loi

- Être précis sur les allégations en lien avec les gaz à effet de serre

- Détailler si l’amélioration en lien avec l’allégation engendre des effets ou des transferts néfastes sur d’autres impacts (changement climatique, consommation ou circularité des ressources, gestion de l’eau et des ressources marines, pollution, biodiversité…).

La proposition cite plusieurs exemples d’allégations environnementales, telles que : « T-shirt fabriqué à partir de bouteilles en plastique recyclé », « livraison avec compensation de CO2 », « protection solaire respectueuse des océans », « emballage composé à 30 % de plastique recyclé », « conduite compensée en carbone » ou « engagement à réduire de 50 % les émissions de CO2 liées à la production de ce produit 2030 par rapport à 2020 » ; pour lesquelles elle exige que les allégations soient justifiées et que cette justification soit vérifiée ex-ante .

La Commission définit ensuite le rôle de l' écolabel, sous-catégorie d’allégation, comme « une marque de confiance, une marque de qualité ou équivalent qui distingue et valorise un produit/procédé d’une entreprise en référence à ses aspects environnementaux ». Avant que les entreprises ne les communiquent aux consommateurs, les « allégations écologiques » couvertes devront être vérifiées de manière indépendante et également être étayées par des preuves scientifiques. La Commission note en effet que les indications sur les produits telles que « climatiquement neutres », « neutre en carbone » ou « compensé à 100% en CO2 » induisent en erreur les consommateurs. Dans le cadre de l'analyse scientifique conduite, les entreprises devront recenser les incidences environnementales qui sont réellement pertinentes pour leur produit, de même que les éventuels arbitrages opérés, afin de donner une image complète et précise.


En outre, au-delà des 230 labels existants, la création de nouveaux labels publics ne sera pas autorisée, à moins que ceux-ci soient élaborés au niveau de l'UE, et tout nouveau système privé devra faire preuve d'un niveau d'ambition environnementale plus élevé que les systèmes existants et faire l'objet d'une autorisation préalable. L'ensemble des labels devront en vertu du texte être fiables, transparents, vérifiés de manière indépendante et régulièrement réexaminés pour prouver la véracité de ces allégations. La nouvelle directive n’offre cependant pas encore de méthode européenne unique pour calculer les incidences écologiques de ces différentes allégations commerciales.

En tout état de cause, les entreprises de moins 10 salariés produisant un chiffre d’affaires annuel ne dépassant pas 2 millions d’euros pourront être exemptées de ces exigences afin « d’éviter des impacts disproportionnés » de surcoût de la procédure.

Plus généralement, plusieurs dispositions assurent que les allégations soient communiquées de manière claire. Ainsi, les allégations ou labels qui utilisent une notation globale des incidences d'un produit sur l'environnement ne seront plus autorisés, sauf s'ils relèvent de règles de l'UE.

Quant aux comparaisons de produits ou d'organisations, elles devraient être fondées sur des informations et des données équivalentes, avec une définition plus stricte que celle connue du droit interne français.

La directive précise également que les entreprises devront « donner la priorité aux réductions efficaces des émissions dans leurs propres opérations et chaînes de valeur au lieu de compter leur compensations » pour parvenir aux objectifs mondiaux de lutte contre le réchauffement climatique.

Il est enfin prévu que chaque État membre désigne l’autorité compétente, les sanctions et les poursuites judiciaires selon ses mécanismes internes de protection des consommateurs. Cependant, dans le sillage de la directive (UE) 2019/2161 du 27 novembre 2019 modifiant la directive 93/13/CEE du Conseil et les directives 98/6/CE, 2005/29/CE et 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne une meilleure application et une modernisation des règles de l’Union en matière de protection des consommateurs, dite directive omnibus, la proposition de directive sur les allégations environnementales reprend les indices de gravité de l’infraction destinés à être pris en compte par les États membres pour augmenter le niveau de sanction. En outre, elle fixe une série de sanctions qui devront être impérativement adoptées par les États membres allant de l’amende, la confiscation du produit concerné ou du revenu tiré des transactions en passant par une exclusion ou interdiction temporaire de commercialisation du produit sur le marché de l’Union européenne
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