Juillet - Novembre 2023

Directive (UE) 2023/2673 du 22 novembre 2023 sur les contrats financiers conclus à distance

La directive 2023/2673 du 22 novembre 2023 sur les contrats financiers conclus à distance a été publiée au JOUE le 28 novembre 2023. Celle-ci vient abroger la directive 2002/65 mais aussi modifier la directive 2011/83 pour y inclure l’ensemble de la réglementation sur les contrats de services financiers qui en étaient jusqu’alors exclus. Aussi le texte ne comporte que cinq articles, le premier étant entièrement consacré à l’ajout de dispositions nouvelles dans la directive 2011/83.

La directive 2022/2673 est d’harmonisation totale ciblée interdisant, sauf exception, aux États membres d'adopter des dispositions plus strictes, comme tel était déjà le cas sous l'empire de la directive de 2002/65.

En créant l'article 16 bis de la directive 2011/83, le texte impose avant tout une série de 24 informations qui doivent être fournies au consommateur par le professionnel « en temps utile avant que [celui-ci] ne soit lié par le contrat » ; la charge de la preuve reposant sur le professionnel. Plus généralement, le professionnel est tenu de fournir les « explications adéquates » (art. 16 quinquies) au consommateur en considération de son niveau de connaissance et de sa situation financière personnelle. La directive impose également d'offrir à celui-ci la possibilité d'être assisté « humainement » pendant le processus de conclusion, de telle sorte que l'entreprise ne peut pas se contenter de le renvoyer vers une foire aux questions (FAQ) ou un « Tchatbot ». en cas de difficultés.

Lesdites informations obligatoires portent essentiellement sur l’identification du professionnel proposant les services financiers, la référence au registre d'enregistrement ou de déclaration du professionnel, la description du service financier, l'accès au coût total de celui-ci pour le consommateur, ou encore la présence d'une adresse de contact en cas de litige. Toutes ces informations devront être fournies sur un support durable dès le stade précontractuel. Cependant, en cas de démarchage téléphonique, à l’instar de ce qui existe déjà pour les contrats portant sur des produits autres que les services financiers, les informations communiquées par téléphone sont réduites mais doivent être complétées par la fourniture de toutes les autres informations dans un second temps sur un support durable.

La directive renforce également, sans préjudice de la directive 2005/29 sur les pratiques commerciales déloyales, la protection contre les présentations trompeuses ou déloyales et les interfaces truquées (Dark patterns) quand celles-ci visent « à tromper ou à manipuler les consommateurs destinataires de leur service ou de toute autre façon propre à altérer ou à entraver substantiellement leur capacité à prendre des décisions libres et éclairée » (art. 16 sexies). La directive est, sur ce point, d’harmonisation minimale.

La directive maintient les conditions de rétractation pour les contrats conclus à distance ayant pour objet un service financier destiné au consommateur, qui figuraient dans la directive 2002/65, avec un délai de 14 jours, voire 30 jours lorsque les opérations visent les retraites individuelles. Elle laisse également subsister l’exclusion du droit de rétractation lorsque « le prix dépend des fluctuations des marchés financiers sur lesquelles le professionnel n'a aucune influence » et que celles-ci ont lieu pendant le délai de rétractation. Cela exclut donc notamment les opérations de change, la titrisation négociable, ou les parts dans des portefeuilles collectifs de placement. Le bénéfice de la rétractation est comme auparavant exclu pour les polices d'assurance de voyage ou de bagages, et plus généralement pour toutes les polices d'assurance d'une durée inférieure à un mois.

Si une partie du service a déjà été fournie avant l'exercice de la rétractation, le consommateur est tenu de cette part, mais le professionnel doit restituer le reste des sommes versées dans un délai de trente jours à compter de la réception de la notification de la rétractation. Le droit de rétractation est écarté pour les contrats exécutés intégralement par toutes les parties avant l'exercice du droit de rétractation.

Concernant le point de départ du délai de rétractation, celui-ci court à partir du jour de conclusion du contrat à distance ou après le jour où le consommateur a reçu les informations précontractuelles et les conditions contractuelles lorsque de telles informations sont délivrées après la signature du contrat. S’inspirant de ce qui existe déjà pour les autres contrats régis par la directive 2011/83, et dans un sens encore plus protecteur du consommateur, il est prévu, ce qui est en la matière nouveau, qu’en cas d'absence totale d'information, le droit de rétractation expire alors douze mois et quatorze jours après la conclusion du contrat. En tout état de cause, celui-ci reste toujours ouvert si le consommateur n'a pas été informé par le professionnel de son droit à la rétractation sur un support durable.

La France devra transposer cette directive d'ici au 19 décembre 2025 pour une entrée en vigueur au plus tard au 19 juin 2026, date à laquelle l’abrogation de la directive 2002/65 prendra effet.

Proposition de révision de la directive 2013/11 sur le règlement extrajudiciaire des litiges et visant à renforcer les droits des consommateurs

La Commission européenne a publié ce 17 octobre 2023 sa proposition de révision de la directive 2013/11/UE du 21 mai 2013 sur le règlement extrajudiciaire des litiges et visant à renforcer les droits des consommateurs.

Le législateur européen entend moderniser et simplifier les règles relatives au règlement extrajudiciaire des litiges afin de les adapter aux marchés numériques, accélérer les procédures, mieux prendre en compte les litiges transfrontières, et élargir l'éventail des domaines concernés par la directive REL, en y incluant en particulier la publicité trompeuse, le blocage géographique injustifié et les pratiques déloyales recourant à des interfaces truquées (dark patterns).

La directive modifiée serait applicable à toutes les infractions au droit de l'UE ayant une dimension de protection des consommateurs, liées par exemple à l'indication de prix trompeuse, aux pratiques discriminatoires, aux questions de changement de fournisseur de services, à l'omission d'informations précontractuelles, à la portabilité du contenu ou aux recours tels que le droit de réparation.

La proposition de la Commission maintient l'approche d'une harmonisation minimale. Les États membres resteront ainsi libres de décider de l'architecture et de la gouvernance du REL au niveau national, tout en garantissant une couverture complète des litiges de consommation. Mais à en croire l'analyse d'impact réalisée par la Commission, l'extension du champ d'application prévue par la proposition de directive pourrait déboucher sur 100 000 litiges éligibles supplémentaires. La proposition impose également aux entreprises de répondre aux demandes qui leur sont soumises, ce qui pourrait engendrer 100 000 autres litiges. Au terme du texte, les opérateurs de pays tiers pourraient par ailleurs également participer volontairement aux procédures de REL.

Néanmoins, sauf si une législation nationale ou européenne particulière impose aux professionnels de prendre part à un règlement extrajudiciaire des litiges, les entreprises resteront libres de décider de participer ou non à un mode de règlement amiable. Toutefois, si un consommateur demande une intervention au titre d'un REL, l'entreprise sera tenue de répondre à sa demande dans un délai de 20 jours ouvrables, même par la négative. La commission entend ainsi équilibrer les intérêts des parties en accélérant le processus et en encourageant les professionnels à y prendre part avec cette obligation de réponse tout en réduisant les obligations d'information à charge des professionnels en la matière. Pour faciliter le traitement, après information des consommateurs, les entreprises pourront également regrouper les dossiers de consommateurs pour y apporter une réponse globale. Les commerçants en ligne ne seront également plus tenus de fournir le lien vers la plateforme de règlement, ni de conserver une adresse email dédiée. Les consommateurs devront cependant être informés si la procédure de REL implique le recours à des procédés automatiques, et les outils numériques proposés devront garantir leur inclusivité, notamment pour les populations les plus éloignées des nouvelles technologies. Du reste, par-delà les exigences de traçabilité des réclamations-consommateurs avec la garantie de pouvoir fournir numériquement les pièces justificatives, les consommateurs devront pouvoir accéder aux documents dans un format non numérique sur demande. Enfin, les parties auront le droit de demander que le résultat d'un traitement automatique de la réclamation soit examiné par une personne physique (au sens d’un « être humain »), lorsque la procédure a été effectuée par des moyens automatisés. Les entités de REL devront publier tous les deux ans des rapports d'activité sur leurs pratiques de traitement et la doctrine critérielle mise en œuvre.

La proposition impose de désigner au profit des consommateurs des interlocuteurs pour leurs REL, en particulier à destination des plus vulnérables d'entre eux. Ces organismes d'information et de « soutien personnalisé » seront chargés de les accompagner dans les procédures de règlement extrajudiciaire de leurs litiges, en s'appuyant sur le réseau des centres européens des consommateurs déjà constitué. Les Etats membres seraient tenus de désigner des points de contact pour faciliter la communication entre les consommateurs et les professionnels, fournir une assistance dans le cadre de la procédure et communiquer des informations générales sur les droits des consommateurs de l'UE et les voies de recours.

La plateforme ODR, qui avait été introduite par le Règlement du 21 mai 2013, et qui était restée ineffective serait en revanche supprimée et remplacée par un outil numérique interactif qui « orientera les consommateurs vers des solutions de recours adaptées à leur situation ».

La proposition de la Commission doit désormais être adoptée par le Parlement européen et le Conseil.

La Commission a parallèlement adopté à la même date une recommandation visant à aligner les systèmes de règlement des litiges des places de marché en ligne sur les normes européennes afin d'assurer un règlement extrajudiciaire des litiges équitable et efficace, en garantissant notamment que les entités de « REL » soient indépendantes et ne se trouvent pas dans une situation de conflit d'intérêts financier. La recommandation décrit également les bonnes pratiques à mettre en œuvre par les associations professionnelles à l'échelle de l'UE pour régler les litiges transfrontaliers.

6 septembre 2023 - Désignation par la Commission des plateformes soumises au Règlement sur les marchés numériques (DMA)

Le 6 septembre 2023, la Commission européenne a publié la liste des vingt-deux plateformes appartenant à six « contrôleurs d'accès » soumises au Règlement sur les marchés numériques (dit Digital Markets Act ou DMA – retrouvez commentaire du texte ici) : quatre réseaux sociaux (TikTok, Instagram, Facebook, LinkedIn), deux messageries instantanées (WhatsApp et Messenger), trois systèmes d'exploitation (Android, iOS, Windows), un moteur de recherche (Google), deux navigateurs (Chrome, Safari), six services d'intermédiation (Google Maps, Google Play, Google Shopping, Amazon Marketplace, App Store et Meta Marketplace), le site de partage de vidéos Youtube, ainsi que les services publicitaires de Google, Amazon et Meta. Malgré le seuil fixé par le règlement atteint, Gmail, Outlook.com et Samsung Internet Browser ne sont pour l'heure pas soumis au DMA, en raison « des arguments suffisamment solides indiquant que ces services ne sauraient être considérés comme des points d’accès pour les services de plateforme concernés » selon la Commission.

Toutes ces entreprises comptent plus de 45 millions d'utilisateurs individuels actifs mensuels ou au moins 10 000 entreprises utilisatrices, avec au moins 7,5 milliards d'euros de chiffre d'affaires dans l'Union européenne, et une capitalisation boursière d'au moins 75 milliards d'euros.

Ces entreprises et plateformes soumises au DMA devront essentiellement permettre aux tiers d’interagir avec leurs propres services dans certaines situations spécifiques (interopérabilité) et permettre aux entreprises utilisatrices d’accéder aux données générées par leurs activités sur leur plateforme. Elles n’auront en revanche plus le droit d’empêcher les consommateurs d’accéder aux services d’entreprises en dehors de leurs plateformes (accès API) ou suivre les utilisateurs finaux en dehors de leur service essentiel à des fins de publicité ciblée sans consentement.

Sous peine d'amende pouvant aller jusqu'à 10% de leur chiffre d'affaires annuel global, ces contrôleurs d'accès disposent de six mois pour démontrer qu'ils respectent leurs obligations mais doivent immédiatement nommer un responsable du respect de ces règles, directement rattaché au Conseil d'administration, et informer la Commission de tout projet de fusion ou d'acquisition.

Parallèlement, la Commission a ouvert cinq enquêtes de marché. Les quatre premières afin d'évaluer les arguments de Microsoft et d'Apple selon lesquels la désignation de contrôleurs d'accès ne s'applique pas à certaines de leurs plateformes, telles que Bing, Edge et Microsoft Advertising, ainsi que les services iMessage d'Apple. En outre, une cinquième enquête a été ouverte et vise l’iPadOS d’Apple. Elle a pour but de déterminer si ce service, « bien qu’il n’atteigne pas les seuils », doit être désigné comme contrôleur d’accès. Cette enquête-ci devra arriver à son terme à l’issue d’un délai maximum de douze mois.

Entrée en vigueur de la "résiliation en trois clics"

Au 1er septembre, conformément au décret n° 2023-417 du 31 mai 2023 relatif aux modalités techniques de résiliation des contrats par voie électronique (commenté ici), tout professionnel qui offre aux consommateurs la possibilité de souscrire un contrat par voie électronique y compris via une application, doit également mettre à sa disposition une fonctionnalité gratuite lui permettant d'accomplir en ligne les démarches de résiliation du contrat, dite « résiliation en trois clics ».

Soumission des « très grandes plateformes en ligne » (VLOP) et « très grands moteurs de recherche (VLOSE) au règlement sur les services numériques (DSA) au 25 août 2023

Les dix-sept « très grandes plateformes en ligne » (Very large online platforms, dites VLOP) et deux « très grands moteurs de recherche » (Very large Online Search engine, dits VLOSE) désignés par la Commission européenne le 25 avril dernier comme soumis au règlement sur les services numériques (Digital Services Act dit DSA) du 19 octobre 2022 doivent depuis le 25 août s'y conformer.

Ces entreprises doivent notamment depuis lors garantir aux internautes la possibilité de se soustraire aux systèmes de recommandations fondés sur le profilage, organiser un système facile de signalement des contenus illicites avec un traitement consécutif diligent, et ne peuvent plus traiter certaines données sensibles pour le ciblage des publicités. Ces plateformes doivent enfin avoir mis en place un système indépendant de contrôle de la conformité, et avoir transmis à la Commission un premier rapport annuel d'évaluation des risques.

Entrée en vigueur du décret "ticket de caisse" du 14 décembre 2022 au 1er août 2023

Au 1er août 2023, le décret du 22 décembre 2022 (commenté ici) entre en vigueur. Désormais les tickets de caisse, de carte bancaire et les bons d’achats ne sont imprimés qu'à la demande du client (qui doivent être informés de cette possibilité par affichage à proximité du lieu d'encaissement).

L’impression d’un ticket reste néanmoins obligatoire pour l’achat de produits ou de service nécessitant un justificatif : les produits sous garantie légale, les produits pesés, les services d’un montant supérieur ou égal à 25 euros, les notes et additions dans le secteur de la restauration et de l’hôtellerie et les accès à un bien ou services (autoroute, parking). Les opérations annulées, non-abouties ou soumises à un régime de pré-autorisation et pour les opérations de crédit (remboursement ou un transfert de fonds) demeurent également justifiées par la remise d’un ticket.

Publication du bilan d'activité 2022 de la DGCCRF

La direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) a présenté le jeudi 6 juillet son rapport d’activité de l’année 2022. Le bilan d'activité détaille les grandes enquêtes et les chiffres clés de la DGCCRF en 2022 et rappelle les grands changements législatifs et réglementaires qui ont marqué le droit de la consommation pour cette année.