Octobre 2022 - Novembre 2022

Décret du 17 novembre 2022 précisant la mention de date de durabilité minimale (DDM)

En application de l'article 35 de la loi AGEC du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, le décret d'application du 17 novembre 2022 est venu préciser la mention de date de durabilité minimale (DDM).

Ce texte incite les industriels à inscrire dorénavant sur les emballages deux mentions spécifiques, au choix ou combinées :

- D’une part « Pour une dégustation optimale », avant l’indication de la DDM.

- D’autre part « Ce produit peut être consommé après cette date ».

- En outre, les entreprises agro-alimentaires ont la possibilité de placer toute mention au sens équivalent pour le consommateur, dans le champ indiqué pour la DDM pour informer le consommateur que le produit reste consommable sans risque pour la santé au-delà de cette date.

L’objectif de cette pratique est de lutter contre le gaspillage alimentaire puisque lorsque les consommateurs l’interprètent fréquemment comme signifiant que, passé l’échéance, il est déconseillé de consommer le produit, voire que ce dernier n’est plus consommable, ils le jettent. Cela entraîne subséquemment une forte chute des ventes des produits proches de leur DDM vendus en magasins.

Le texte réglementaire aspire à mettre fin à la confusion persistance chez les consommateurs entre DLC (date limite de consommation) et DDM (Date de durabilité minimale). Cette dernière indique une date au-delà de laquelle on peut consommer une denrée alimentaire sans risque pour sa santé, mais le produit peut connaître une altération de l’odeur, du goût, de l’aspect et une diminution de sa valeur nutritive. La première, la DLC, est pour sa part une date de consommation maximale pour raison sanitaire, notamment face au risque pour la santé de la prolifération microbienne en cas de consommation plus tardive.

Le ministère de l’Économie précise que le décret s’applique aux denrées alimentaires fabriquées et commercialisées sur le territoire national. Il n’est pas assorti de sanctions.

Il s’agit simplement d’une incitation pour impliquer davantage les industriels dans la réduction du gaspillage alimentaire. Le nouveau décret accompagne à cet égard les lois « Anti-gaspillage pour une économie circulaire » (AGEC) mais également « Climat et Résilience », respectivement promulguées les 10 février 2020 et 22 août 2021.

Indice de réparabilité - Nouveaux produits concernés au 4 novembre 2022

Conformément à la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) de 2020, depuis le 1er janvier 2021, le caractère réparable de certains produits doit apparaître lors de leur mise en vente par le moyen de l'affichage d'un indice de réparabilité. La mesure vise notamment les téléviseurs, les ordinateurs portables, les smartphones et les tondeuses à gazons. D'autres catégories de produits électriques et électroniques sont progressivement concernées.


 

L'indice de réparabilité est déterminé à partir de cinq critères :

- la disponibilité de la documentation technique ;

- la facilité de démontage de l'appareil et les outils nécessaires pour y parvenir ;

- l'information sur la disponibilité ou la non-disponibilité des pièces détachées et la durée de disponibilité ;

- le prix des pièces détachées par rapport au prix du produit neuf ;

- et un critère spécifique à chaque catégorie de produit.


 

Ont été successivement publiés plusieurs arrêtés définissant les critères et sous-critères du système de notation pour le calcul et l'affichage de l'indice idoine de plusieurs catégories de produits, dont les six derniers datent du 22 avril 2022 (ici, ici, ici, ici, ici, et ici) concernant les lave vaisselles, sèches-linge, nettoyeurs à haute pression, et aspirateurs (filaires, sans fil et robots).

Le système d'information des consommateurs les concernant est entré en vigueur au 4 novembre 2022. Les textes réglementaires prennent notamment en compte les dispositifs d'assistance à distance sans frais, l'accessibilité des compteurs d'usage et la possibilité de réinitialisation logicielle.


Très concrètement, en magasin et sur les sites de vente à distance, une note sur 10 est apposée sur le produit, sur son emballage ou à côté du prix indiquant que le produit est « réparable » ; « difficilement réparable » ; ou « non-réparable » ; avec un continuum au terme duquel plus la note est élevée, plus l'appareil est réparable. Pour une identification immédiate, une notation est associée à une couleur, allant du rouge pour les produits non réparables au vert foncé pour ceux qui sont facilement réparables.
 

Le réparateur a de plus l'obligation de proposer au consommateur des pièces détachées issues de l'économie circulaire. À chaque fois que cela est pertinent, le produit doit aussi proposer un compteur d'usage (similaire à un compteur kilométrique). En outre, la gestion des déchets issus des équipements électroniques et électroniques ménagers étant assurée par les producteurs, ceux-ci doivent mettre en place soit un système individuel agréé, soit adhérer à un éco-organisme titulaire d'un agrément.


 

Au 1er janvier 2024, un indice de durabilité viendra compléter ou remplacer l'indice de réparabilité, avec de nouveaux critères comme la fiabilité et la robustesse du produit, concernant une liste d'équipements concernés qui sera définie par décret.

Publication du Digital Service Act (DSA) - JOUE 27 octobre 2022 (L 277/1).

Après le Digital Market Act (DMA) publié au JOUE le 12 octobre 2022, le Digital Service Act (DSA), a été adopté le 19 octobre 2022 et publié au JOUE du 27 octobre 2022 (L 277/1).

Ce Règlement (UE) 2022/2065 du Parlement Européen et du Conseil du 19 octobre 2022 relatif à un marché unique des services numériques, dit Règlement sur les services numériques,
qui modifie la directive 2000/31/CE (directive commerce électronique) vise à moderniser et à harmoniser au sein du marché intérieur les législations nationales face aux risques et défis de la transformation numérique. Son application concerne les « fournisseurs de services intermédiaires en ligne », c'est-à-dire les hébergeurs, les réseaux sociaux, les moteurs de recherche, les plateformes de voyage et d'hébergement et les sites marchands.

Le DSA et le DMA forment un ensemble unique de nouvelles règles qui seront applicables dans l’ensemble de l’UE afin de « créer un espace numérique plus sûr et plus ouvert », à travers deux objectifs essentiels : « créer un espace numérique plus sûr dans lequel les droits fondamentaux de tous les utilisateurs de services numériques sont protégés » et « établir des conditions de concurrence équitables pour favoriser l’innovation, la croissance et la compétitivité, tant dans le marché unique européen que dans le monde ». Ils avaient été annoncés en février 2020 dans la communication de la Commission européenne intitulée « Façonner l'avenir numérique de l'Europe ».
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Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur, résuma l'économie générale du DSA en ces mots : « dans bien des cas, l’espace numérique est une zone de non-droit. Il s’agit pour l’Europe de reprendre la main sur les plateformes structurantes [...]. Le fil conducteur du DSA est simple : ce qui est autorisé offline doit l’être online, ce qui est interdit offline doit l’être online. Que l’on parle de contrefaçon, d’antisémitisme, de pédopornographie, de menaces de mort ou de vente de drogues, tous les contenus illégaux doivent être retirés. Les contenus haineux, l’amplification de la violence verbale et physique, la désinformation doivent être identifiés comme tels et traités en conséquence. Tout ce qui est interdit dans l'espace public sera aussi interdit dans l’espace online »

Le DSA vise ainsi à :
- favoriser le développement des PME et des services numériques innovants dans le marché intérieur ;
- lutter contre la diffusion de contenus illicites et la désinformation en ligne ;
- préserver le respect des droits fondamentaux garantis par Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (liberté d’expression et d’information, principe de non-discrimination, respect du niveau élevé de protection des consommateurs, etc.) ;
- agir contre les contenus pouvant avoir des effets négatifs réels ou prévisibles sur la sécurité publique et les processus démocratiques et électoraux
- interdire la publicité ciblée envers les mineurs ;
- endiguer le cyberharcèlement.

Le DSA sera applicable en février 2024
, sauf pour les très grandes plateformes en ligne et les très grands moteurs de recherche qui seront concernés dès 2023. Le texte doit également être complété par des actes délégués de la Commission européenne en préparation.

Le DSA établit à titre liminaire une série d'objectifs :
- mieux protéger les internautes européens et leurs droits fondamentaux (liberté d'expression, protection des consommateurs...) ;
- aider les petites entreprises de l'UE à se développer ;
- renforcer le contrôle démocratique et la surveillance des très grandes plateformes ;
- atténuer des risques systémiques, tels que la manipulation de l'information ou la désinformation.

=> Le règlement DSA doit s'appliquer à tous les
intermédiaires en ligne qui offrent leurs services (biens, contenus ou services) sur le marché européen, peu important que ces intermédiaires soient établis en Europe ou ailleurs dans le monde. Sont ainsi concernés : les fournisseurs d'accès à internet (FAI) ; les services d'informatique en nuage (cloud) ; les plateformes en ligne comme les places de marché (market places), les boutiques d'applications, les réseaux sociaux, les plateformes de partage de contenus, les plateformes de voyage et d'hébergement ; les très grandes plateformes en ligne et les très grands moteurs de recherche (utilisés par plus de 45 millions d'Européens par mois), cette dernière catégorie visant donc indirectement les GAFAM même s'ils ne sont pas directement nommés.

Tous ces intermédiaires devront respecter de
nouvelles obligations, proportionnées à la nature de leurs services, à leur taille, à leur poids et aux risques et dommages sociétaux qu'ils peuvent causer. Afin d'éviter des contraintes disproportionnées, les microentreprises et les petites entreprises (de moins de 50 salariés et ayant un chiffre d'affaires annuel inférieur à 10 millions d'euros) n'atteignant pas 45 millions d'utilisateurs seront exemptées de l'application de diverses mesures (rapports de transparence, système interne de traitement des réclamations,...).

Les acteurs régulés devront également désigner un point de contact unique ou, s'ils sont établis hors UE, un représentant légal et coopérer avec les autorités nationales en cas d'injonction

Les plateformes concerner devront généralement :
- formuler les conditions générales de
manière simple, intelligible, aisément abordable et sans ambiguïté, les informations fournies comprennent les mécanismes de recours et de réparation disponibles pour l’utilisateur ;
- établir des rapports de transparence portant sur leurs systèmes internes de traitement des réclamations et leurs activités de modération des contenus ;
- suspendre, pendant une période raisonnable et après avertissement, la fourniture de leurs services aux utilisateurs diffusant fréquemment des contenus manifestement illicites ;
- prendre des mesures appropriées et proportionnées afin de garantir un niveau élevé de protection de la vie privée, de la sûreté et de la sécurité des mineurs.

=> Quant au contenu matériel du texte :

→ La directive commerce électronique (art. 15) avait exempté les fournisseurs de services d’une obligation générale de surveillance. Le DSA, sans remettre en cause ce principe, renforce cependant la lutte contre les contenus illicites :

- Les plateformes en ligne devront tout d'abord proposer aux internautes un outil leur permettant de signaler facilement les contenus illicites. Une fois le signalement effectué, elles devront rapidement retirer ou bloquer l'accès au contenu illégal. – Dans ce cadre, les plateformes devront coopérer avec des « signaleurs de confiance ». Ce statut sera attribué dans chaque pays à des entités ou organisations en raison de leur expertise et de leurs compétences. Leurs notifications seront traitées en priorité. Les places de marché devront également mieux tracer les vendeurs qui proposent des produits ou services sur leur plateforme (via un recueil d'informations précises sur le professionnel avant de l'autoriser à vendre avec une vérification de la fiabilité de celles-ci) et mieux en informer les consommateurs.
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Les plateformes devront également rendre plus transparentes leurs décisions en matière de modération des contenus. Elles devront prévoir un système interne de traitement des réclamations permettant aux utilisateurs dont le compte a été suspendu ou résilié de contester cette décision. Pour régler le litige, les utilisateurs pourront également se tourner vers des organismes indépendants et certifiés dans les pays européens ou saisir leurs juges nationaux.

→ Le DSA imposer un devoir de transparence :

Les plateformes devront par ailleurs expliquer le fonctionnement des algorithmes qu'elles utilisent pour recommander certains
contenus publicitaires en fonction du profil des utilisateurs. Les très grandes plateformes et les très grands moteurs de recherche auront l'obligation de proposer un système de recommandation de contenus non-fondé sur le profilage. Elles devront en outre mettre à disposition du public un registre des publicités contenant diverses informations (qui a parrainé l’annonce, comment et pourquoi elle cible tels individus).

La publicité ciblée pour les mineurs sera interdite pour toutes les plateformes, de même que la publicité basée sur des données sensibles comme la religion ou l’orientation sexuelle (sauf consentement explicite).

Les interfaces trompeuses connues sous le nom de « pièges à utilisateurs » (dark patterns) et les pratiques visant à induire les utilisateurs en erreur (mise en avant de certains choix...) seront prohibées.

→ Tenant compte du fait que les très grandes plateformes et les très grands moteurs de recherche jouent un rôle très important et influent sur la sécurité en ligne, la diffusion de l'information, la formation de l'opinion publique et les transactions économiques, d'autres mesures leurs seront enfin imposées, proportionnées aux risques sociétaux qu’ils représentent lorsqu’ils diffusent des contenus illicites ou préjudiciables, comme la désinformation.

Ces grands acteurs, dont la liste sera publiée par la Commission européenne, devront notamment analyser tous les ans les risques systémiques qu'ils génèrent (sur la haine et la violence en ligne, les droits fondamentaux, le discours civique, les processus électoraux, la santé publique...) et prendre les mesures nécessaires pour atténuer ces risques (respect de codes de conduite, suppression des faux comptes, visibilité accrue des sources d'information faisant autorité...). Ils devront également effectuer tous les ans des audits indépendants de réduction des risques sous le contrôle de la Commission européenne ; mais encore fournir les algorithmes de leurs interfaces à la Commission et aux autorités nationales compétentes ; ainsi qu'accorder un accès aux données clés de leurs interfaces aux chercheurs agréés afin qu'ils puissent mieux comprendre l'évolution des risques en ligne. Ils seront également tenus de développer une stratégie spécifique concernant la
protection des mineurs

Un mécanisme de réaction aux crises touchant la sécurité ou la santé publique est enfin prévu par le texte au terme duquel la Commission européenne pourra demander aux grands acteurs une analyse des risques que posent leurs interfaces lorsqu'une crise émerge (comme la récente agression russe contre l'Ukraine ou la COVID-19) et leur imposer pendant un temps limité des mesures d’urgence.


=> Afin d'assurer la bonne application de toutes ces mesures, dans tous les pays de l'UE, un « coordinateur des services numériques », autorité indépendante désignée par chaque État membre devra être en place. En France, l'autorité des médias déjà existante, l'ARCOM, assurera cette mission.

Les vingt-sept coordinateurs désignés seront chargés de contrôler le respect du règlement DSA dans leur pays et de recevoir les plaintes à l'encontre des intermédiaires en ligne. Ils coopéreront au sein d'un « comité européen des services numériques » qui rendra des analyses, mènera des enquêtes conjointes dans plusieurs pays et émettra des recommandations sur l'application de la nouvelle réglementation. Ce comité devra notamment recommander la Commission sur l'activation du mécanisme de réponse aux crises.

Les très grandes plateformes en ligne et les très grands moteurs de recherche seront surveillés directement par la Commission européenne. Pour financer cette surveillance, des « frais de supervision » leur seront demandés, dans la limite de 0,05% de leur chiffre d’affaires annuel mondial. Les GAFAM concernés devront désigner un ou plusieurs responsables de la conformité au règlement.

En cas de non-respect du DSA, les coordinateurs des services numériques et la Commission pourront prononcer des astreintes et des sanctions. Pour les très grandes plateformes et les très grands moteurs de recherche, la Commission pourra infliger des amendes pouvant aller jusqu'à 6% de leur chiffre d'affaires mondial. En
ultima ratio, en cas de violations graves et répétées au règlement, les plateformes pourront finalement se voir interdire leurs activités sur le marché européen