Février 2024 - Mars 2024

Règlement n° 2024/886 du 13 mars 2024 modifiant les règlements UE n°260/2012 et 2021/1230 et les directives n° 98/26/CE et 2015/2366 en ce qui concerne les virements instantanés en euros

Le règlement 2024/886 (JOUE L 2024/886, 19 mars 2024) a été adopté par le Parlement et la Commission afin de rendre les virements instantanés en euros (dits SCT Inst :« Sepa Instant Credit Transfer »), réalisés 24h/24 et en dix secondes, disponibles pour les consommateurs et les entreprises dans l’Union européenne et dans les pays de l’Espace économique européen, pour des virements dans un même pays comme vers un autre État membre. Le virement instantané est conçu comme une réponse des institutions européennes à l’importance prise par les grands systèmes de paiement internationaux (tels Visa et Mastercard ou Unionpay) et aux GAFAM qui s’intéressent de plus en plus aux paiements. À cet égard, les différences entre les solutions réglementaires nationales ont été vues comme de nature à entraîner un risque de fragmentation du marché intérieur des services de paiement.

Depuis 2009, le droit régissant le virement se trouve aux articles L. 133-1 et suivants du Code monétaire et financier, qui encadrent les opérations de paiement réalisées aussi bien par virement que par carte bancaire et par prélèvement. Ces dispositions se trouvent modifiées par le présent règlement.

Les établissements bancaires ont désormais l'obligation de proposer un versement instantané ; d'ici au 9 janvier 2025 pour la réception et au 9 octobre 2025 pour l'émission. Les établissements de crédit des pays de l’Union européenne dont la monnaie n’est pas l’euro (Danemark, Suède, Pologne, Roumanie, Bulgarie) disposeront d’un délai supplémentaire de deux ans (soit jusqu’aux 9 janvier et 9 juillet 2027) pour appliquer ce règlement ; et même jusqu’en 2028 pour les virements effectués à partir de comptes libellés dans leur monnaie nationale. Un article 5 bis prévoyant une telle obligation est ainsi ajouté au règlement (UE) n° 260/2012 du 14 mars 2012.

Par ailleurs, sans exiger la gratuité des virements instantanés, il est demandé aux prestataires de services de paiement (PSP) de rendre les paiements instantanés en euros abordables, et d'aligner leurs tarifs entre virements « classiques » et instantanés. Les établissements ont jusqu'au 9 janvier 2025 pour procéder à l'alignement tarifaire concernant les PSP situés dans un État membre dont la monnaie est l’euro, et jusqu'au 9 janvier 2027 pour les autres.

Les clients devront également être en mesure de soumettre un ensemble groupé d’ordres de paiement si les PSP offrent cette possibilité à leurs clients pour d’autres virements.

Les PSP devront également autoriser leurs clients à fixer, pour les virements instantanés, un montant maximal d'engagement, soit par jour, soit par opération.

Le règlement du 13 mars 2024 prévoit encore le renforcement de la confiance dans les paiements instantanés, avec l’obligation, pour les PSP, de vérifier la concordance entre le numéro de compte bancaire (IBAN) et le nom du bénéficiaire fourni par le payeur afin d’alerter ce dernier d’une éventuelle erreur ou fraude avant que le paiement ne soit effectué.

Les PSP sont enfin tenus de vérifier dans l'exécution des virements instantanés si l’un quelconque de leurs utilisateurs ou entités est concerné par une mesure de gel des avoirs via un dispositif de filtrage automatisé.

Directive 28 février 2024 donnant aux consommateurs les moyens d’agir en faveur de la transition verte

La directive (UE) n° 2024/825 du 28 février 2024 donnant aux consommateurs les moyens d’agir en faveur de la transition verte grâce à une meilleure protection contre les pratiques déloyales et à une meilleure information a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne (JOUE) le 6 mars dernier. Celle-ci vient modifier la directive n° 2005/29 du 11 mai 2005 sur les pratiques commerciales déloyales ainsi que la directive n° 2011/83/UE relative aux droits des consommateurs.

Ce texte ambitionne à la fois de permettre aux consommateurs de choisir des produits et services plus écologiques ou circulaires, mais aussi de remédier à des pratiques telles que le blanchiment écologique trompeur ou aux fausses allégations concernant la durée de vie des produits. En 2020, une étude réalisée par la Commission européenne estimait que sur 150 allégations environnementales du type « neutre en carbone », « zéro carbone » « issue de matériaux recyclés », 53,3 % d’entre elles étaient vagues, trompeuses ou infondées. À l’époque, la Commission avait également recensé 230 labels de durabilité dans l’Union européenne avec des niveaux de transparence très hétérogènes. Rien qu’en France, un quart des 1100 établissements contrôlés par la DGCCRF en 2023 sur des produits non alimentaires et services mettaient en avant des « allégations globalisantes, non justifiées, imprécises, ambiguës ou même contraires aux dispositions légales » susceptibles de tromper le consommateur.

La nouvelle directive insère tout d'abord dans la directive 2005/29 la définition de l’allégation environnementale entendue comme « tout message ou toute déclaration non obligatoire en vertu du droit de l’Union ou du droit national, sous quelque forme que ce soit, notamment du texte, une image, une représentation graphique ou un symbole tels que un label, une marque, une dénomination sociale ou une dénomination de produit, dans le cadre d’une communication commerciale, et qui affirme ou suggère qu’un produit, une catégorie de produits, une marque ou un professionnel a une incidence positive ou nulle sur l’environnement, est moins préjudiciable pour l’environnement que d’autres produits, catégories de produits, marques ou professionnels, ou a amélioré son incidence environnementale au fil du temps ».

Afin de permettre aux consommateurs de prendre des décisions d'achat respectueuses de l'environnement, la directive modifie l'article 6§1 de la directive 2005/29 qui énumère les éléments sur lesquels l’information fausse ou trompeuse doit porter pour caractériser une pratique commerciale trompeuse par action. Sont ainsi visées les « caractéristiques environnementales ou sociales » du produit ainsi que « ses accessoires, les aspects liés à la circularité, tels que sa durabilité, sa réparabilité ou sa recyclabilité ».

Par ailleurs, la nouvelle directive allonge l’article 6§2 prévoyant les autres cas où une pratique peut être jugée trompeuse trompeuse si, dans son contexte factuel, compte tenu de toutes ses caractéristiques et des circonstances, elle amène ou est susceptible d'amener le consommateur moyen à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement.

Est intégrée « une allégation environnementale relative aux performances environnementales futures sans engagements clairs, objectifs, accessibles au public et vérifiables inscrits dans un plan de mise en œuvre détaillé et réaliste qui inclut des objectifs mesurables et assortis d’échéances (…), et qui est régulièrement vérifié par un tiers expert indépendant, dont les conclusions sont mises à la disposition des consommateurs ». Désormais, les labels environnementaux, qu’ils soient privés ou publics, comme les labels agriculture biologique (AB) ou « Haute Valeur environnementale » (HVE), devront donc obéir à un système de certification par tierce partie et témoigner de règles de transparence poussées. Cela conduira à exclure tous les auto-labels ou les labels avec des schémas d’attribution opaques.

Est également désormais visée la publicité d'avantages pour les consommateurs qui ne sont pas pertinents et qui ne sont pas directement liés à une caractéristique du produit ou de l'entreprise.

Par ailleurs, l'article 7 de la directive 2005/29 relatif aux omissions trompeuses est également modifié. La liste des informations substantielles dont l’omission est susceptible de caractériser la pratique commerciale trompeuse s’enrichit des informations sur la méthode de comparaison, sur les produits qui font l'objet de la comparaison et sur les fournisseurs de ces produits, ainsi que sur les mesures visant à tenir ces informations à jour.

La directive étend par ailleurs la liste des pratiques commerciales qui doivent être considérées comme déloyales en toutes circonstances (« liste noire ») à sept pratiques d'obsolescence précoce et à quatre pratiques d'écoblanchiment. Cette extension vise notamment :

- le fait d’afficher un label de développement durable qui n’est pas fondé sur un système de certification ou qui n’a pas été mis en place par des autorités publiques ;
- le fait de présenter une allégation environnementale générique au sujet de laquelle le professionnel n’est pas en mesure de démontrer l’excellente performance environnementale reconnue en rapport avec l’allégation ;
- le fait de présenter une allégation environnementale concernant l’ensemble du produit ou de l’entreprise du professionnel, alors qu’elle ne concerne qu’un des aspects du produit ou une activité spécifique de l’entreprise du professionnel ;
-
ou le fait d’affirmer, sur la base de la compensation des émissions de gaz à effet de serre, qu’un produit a un impact neutre, réduit ou positif sur l’environnement en termes d’émissions de gaz à effet de serre. Elle n’interdit pas l'utilisation de systèmes de compensation des émissions de carbone, ni même la publicité pour ces systèmes, mais bien d'affirmer que les compensations de carbone auraient un impact neutre, réduit ou même positif sur l'environnement et donner ainsi l'impression que l'impact environnemental d'un produit ou d'un service serait neutralisé par cette compensation. L'allégation publicitaire fréquente relative à la neutralité carbone sera ainsi considérée comme déloyale, quelles que soient les circonstances spécifiques de l'affaire, si la neutralité carbone est obtenue par la compensation carbone. Ce texte européen va ainsi plus loin que la loi « Climat et résilience » française qui encadrait déjà ces pratiques en droit interne, et où le décret d’application demandait de rendre public le bilan des émissions de GES sur l’ensemble du cycle de vie du produit ainsi que la trajectoire des émissions prévues et les modalités de compensations résiduelles pour pouvoir communiquer sur la neutralité carbone. Désormais, les communicants d’entreprises pourront signaler que leur société a adopté un tel système de réduction des externalités environnementales négatives, mais uniquement pour des émissions résiduelles.
- Mais également présenter comme une caractéristique distinctive de l’offre du professionnel des exigences imposées par la loi pour tous les produits de la catégorie de produits concernée sur le marché de l’Union.
- Dissimuler au consommateur le fait qu’une mise à jour logicielle aura une incidence négative sur le fonctionnement de biens comportant des éléments numériques ou sur l’utilisation de contenu numérique ou de services numériques.
- P
résenter une mise à jour logicielle comme étant nécessaire lorsqu’elle ne fait qu’améliorer des fonctionnalités.
- Pratiquer toute communication commerciale sur un bien doté d’une caractéristique introduite pour en limiter la durabilité, alors même que l’information de cette caractéristique et de ses effets sur la durabilité du bien se trouve à la disposition du professionnel.
- Affirmer à tort qu’un bien présente une certaine durabilité, sur le plan du temps d’utilisation ou de l’intensité, dans des conditions normales d’utilisation.
- Présenter un bien comme réparable alors qu’il ne l’est pas.
- Inciter le consommateur à remplacer les consommables ou à se réapprovisionner en consommables d’un bien avant que des raisons techniques ne le justifient.
- Et dissimuler des informations sur la détérioration de la fonctionnalité d’un bien lorsque des consommables, des pièces de rechange ou des accessoires qui ne sont pas fournis par le producteur d’origine sont utilisés, ou affirmer à tort qu’une telle détérioration va se produire.
 

La directive prohibe toute une série de douze nouvelles pratiques commerciales en matière environnementale en apportant des modifications à la directive 2005/29/EC. Sont notamment visées les :
- publicités pour une caractéristique qui limite la durabilité d'un produit ;
- allégations environnementales génériques, qui ne correspondent pas à une performance environnementale reconnue en rapport avec l'allégation ;
- allégations environnementales portant sur l'ensemble d'un produit ou de l'entreprise du professionnel, alors qu'elles ne concernent qu'un des aspects du produit ou une activité spécifique de l'entreprise ;
- affirmations basées sur la compensation des émissions de gaz à effet de serre ;
- labels de durabilité non fondés sur des systèmes de certification approuvés ;
- dissimulations au consommateur sur le fait qu'une mise à jour logiciel aura une incidence négative sur le fonctionnement de biens comportant des éléments numériques ;
-
mentions de durabilité non prouvées ;
- incitations à remplacer les consommables (ex. cartouches et toners d’imprimantes) ;
- présentations de marchandises comme étant réparables lorsqu'elles ne le sont pas ;
-
labels de développement durable qui ne sont pas fondés sur un système de certification ou qui n'ont pas été mis en place par les autorités publiques.

En outre, le nouveau texte modifie la directive 2011/83 :

D’une part la liste des renseignements prévus dans l’article 5 au titre de l’obligation générale d’information précontractuelle est élargie à la durabilité, la réparabilité et la disponibilité des mises à jour ou de pièces détachées. Celles-ci doivent être rédigées de manière claire et compréhensible, et conformément aux exigences de la directive 2019/882 du 17 avril 2019 en matière d'accessibilité. Cette obligation précontractuelle d'information complète à cet égard les directives 2019/770 et 2019/771 du 20 mai 2019.

D’autre part, de sorte à garantir que les consommateurs sont bien informés et comprennent facilement leurs droits, la directive UE nº 2024/825 ajoute dans la directive 2011/83 un article 22 bis prévoyant la mise en place d'une notice harmonisée et d'un label harmonisé.

La notice harmonisée est utilisée pour fournir des informations sur la garantie légale de conformité des biens, notamment sa durée minimale de deux ans et une référence générale à la possibilité que la durée de la garantie légale de conformité soit plus longue en vertu du droit national.

De son côté, le label harmonisé est utilisé de manière à permettre aux consommateurs d'identifier facilement le bien spécifique qui bénéficie d'une garantie commerciale de durabilité offerte par le producteur sans frais supplémentaires, couvrant l'intégralité du bien, et pour une durée de plus de deux ans. La conception et le contenu de la notice harmonisée et du label harmonisé seront spécifiés par la Commission européenne par voie d'actes d'exécution.

Les États membres devront transposer la directive 2024/825 dans leur droit national avant le 27 mars 2026 et appliquer ses dispositions à compter du 27 septembre 2026.